« La Tour Eiffel, dont la commerciale Amérique elle-même ne voudrait pas, c’est, n’en doutez pas, le déshonneur de Paris » : l’accueil fut plutôt froid, au lancement du projet !

La phrase est tirée d’un manifeste corsé et très clair sur son intention de faire capoter le projet, signé par des personnalités comme Guy de Maupassant ou l’architecte de l’opéra Charles Garnier. D’après eux, on n’aurait pu choisir pire projet, alors que 107 propositions avaient été déposées pour la construction d’un bâtiment destiné à marquer la grandeur de la France, lors de la prochaine Exposition Universelle.

Peine perdue, « l’odieuse colonne de tôle boulonnée », comme ils la nommaient, vit bel et bien le jour en 1889. Pire ! La concession accordée pour 20 ans fut finalement prolongée à 70 ans en 1910, avant qu’elle devienne permanente. Il faut dire que l’ingénieur Gustave Eiffel a tout fait pour rendre son œuvre indispensable : vu les critiques, il savait que pour le salut de sa tour, il fallait lui donner une utilité technique et scientifique. Dès le début, il installe une station météorologique à bord, grâce à laquelle il multiplie les expériences (sur la résistance de l’air surtout). La tour est équipée d’une station de TSF en 1898, puis après la mort d’Eiffel, en 1925, sont installées les premières stations radio et TV. Aujourd’hui, celle qui s’est imposée comme LE symbole de Paris et de la France, est aussi un super émetteur pour la grande majorité des chaînes de télé et de radio.

Et puis la tour, elle présentait bien : c’était la preuve de la fougue Française, de sa maîtrise de la technologie et de la modernité du pays. Bon, les fondations ont été creusées à la pelle (véridique), mais pour le reste, le montage du Meccano géant était ul-tra moderne ! La tour Eiffel a conservé la palme du plus haut édifice du monde jusqu’en 1929, date de la construction de l’immeuble Chrysler à New-York. A sa construction, c’était « the place to be », au point que le Figaro installera son imprimerie au 2eme étage en 1889 !

Des exploits ont émaillé l’existence de l’édifice, ils n’ont pas tous brillé par leur réussite : en 1912, l’homme oiseau se jette du 1er étage pour une démonstration et s’écrase lamentablement au sol devant un parterre de curieux, de journalistes et… de la première caméra. L’homme était en fait un tailleur d’origine autrichienne qui avait sur le dos ni plus ni moins qu’un poncho amélioré. Poncho qui ne lui aura pas évité la mort.

En 1984, deux britanniques prennent plus de précaution en choisissant le parachute pour sauter clandestinement depuis le 3ème étage. Cinq ans plus tard, Philippe Petit part du Trocadéro pour rejoindre le 2ème étage de la tour Eiffel sur son fil : le funambule parcourt 700 mètres sans protection !

Supplément crânerie : En 1953, le 25 millionième visiteur de la Tour Eiffel reçut comme cadeau une voiture, quelle surprise ! Quelle suprise aussi en 1983 pour le cent millionième visiteur qui eut… Mireille Mathieu comme hôtesse pour sa visite sur la tour… Quant au 150 millionième visiteur, en 1993, il ne reçut rien, ni Mireille Mathieu, ni voiture : tout se perd ma bonne dame !

Truc utile : la tour Eiffel, c’est toujours bondé. Pour avoir une chance de moins faire la queue, il faut choisir le pilier sans ascenseur : on gravit les étages à pied, ça maintient en forme et on n’a pas l’impression de faire partie d’un troupeau de moutons géant. C’est plus gratifiant, quelque part !